Références
CAA de NANCY
N°
14NC00528
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre - formation à 3
M. LAPOUZADE, président
M. Alain LAUBRIAT, rapporteur
M. WIERNASZ, rapporteur public
JONES DAY ; JONES DAY ; SCP LYON-CAEN & THIRIEZ ; JONES DAY,
avocat
lecture du lundi 23 juin 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu, I°), sous le numéro 14NC00528, le recours, enregistré le 26 mars
2014, du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ; le
ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler les jugements n° 1302032 et suivants du 11 février 2014
par lesquels le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé
la décision du 16 octobre 2013 par laquelle le directeur régional des
entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de
l'emploi de Champagne-Ardenne a homologué le plan de sauvegarde de
l'emploi de l'entreprise ODCF ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. FabriceG...et autres
devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
Le ministre soutient que :
- les premiers juges, qui ont fondé leur décision sur les déclarations
des demandeurs de première instance à l'audience, ont méconnu l'article
R. 613-2 du code de justice administrative ainsi que le principe du
contradictoire ;
- c'est à tort que le tribunal, s'estimant saisi d'un recours de plein
contentieux, a examiné la légalité de la décision contestée à la date à
laquelle il a statué ;
- le tribunal a méconnu les dispositions des articles L. 1233-61 à
1233-63 du code du travail en appréciant le caractère suffisant du plan
de sauvegarde de l'emploi, d'une part, au regard de chacune des mesures
qu'il prévoit et non pas au regard de son équilibre global, d'autre
part, au regard des montants consacrés à chaque type de mesures ; le
tribunal, qui n'a pas pris en considération que le plan de sauvegarde
de l'emploi en litige offrait aux salariés la possibilité de conclure
un contrat de sécurisation professionnelle, a commis une erreur de fait
; le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi devait être apprécié au
regard des difficultés financières de la société ODCF qui était en
liquidation judiciaire, mais également au regard du délai de prise en
charge des créances salariales par l'association pour la gestion du
régime de Garantie des créances des Salariés (AGS) ;
- le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi en litige est suffisant
; les mesures de reclassement figurant au plan de sauvegarde de
l'emploi sont adaptées au marché du travail et à l'environnement local
; le plan de sauvegarde de l'emploi, tout en proposant un nombre
significatif de mesures de mobilité géographique, privilégie le budget
consacré à la formation avec pour objectif une reconversion
professionnelle permettant aux salariés licenciés de retrouver un
emploi dans la région Champagne Ardenne ; les aides à la formation et
les aides à la création d'entreprise prévues dans le plan de sauvegarde
de l'emploi peuvent être complétées par d'autres financeurs ; les
budgets affectés à chaque mesure sont fongibles ; les onze entreprises
du groupe ont été sollicitées pour proposer des offres de reclassements
; le mandataire a recherché des postes de reclassement externe ;
- le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi en litige est
proportionné aux moyens de l'entreprise et du groupe ; après un refus
de l'administration d'homologuer le premier plan de sauvegarde de
l'emploi qui lui avait été présenté, le mandataire a amélioré les
mesures proposées ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le délai de
mise en oeuvre des mesures prévues au plan de sauvegarde de l'emploi
était de nature à justifier l'annulation de la décision procédant à son
homologation ; la qualité des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi
doit s'apprécier, non au regard de leur délai de mise en oeuvre, mais
au regard de leur efficacité en termes de retour à l'emploi ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en intervention, enregistré le 11 avril 2014, présenté
pour la société Overhead Door Corporation (ODC), dont le siège est
situé 2501 S. State Hwy 121, Suite 200, Lewisville, Texas, 75067,
États-Unis d'Amérique, par Me AssayaetAA..., qui conclut à l'annulation
du jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 16 octobre 2013 par
laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de
la consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne a
homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de l'entreprise ODCF ;
La société ODC soutient que :
- les premiers juges, qui ont fondé leur décision sur les déclarations
des demandeurs de première instance à l'audience, ont méconnu le
principe du contradictoire ; le tribunal, en s'estimant saisi d'un
recours de plein contentieux, a commis une erreur de droit ;
- ni l'administration, ni le juge administratif ne sauraient exercer un
contrôle d'opportunité sur le contenu des mesures d'un plan de
sauvegarde de l'emploi ; le tribunal a excédé ses pouvoirs en
appréciant l'opportunité et l'efficacité des mesures prévues au plan de
sauvegarde de l'emploi de la société ODCF, et notamment des mesures
destinées à accompagner les salariés de cette société dans le cadre
d'une mobilité en France ou à l'étranger ;
- la société ODCF a respecté ses obligations légales et réglementaires
en prévoyant des mesures proportionnées à ses moyens ainsi qu'à ceux du
groupe auquel elle appartient ;
- le refus des salariés de suivre les mesures mises en oeuvre dans le
cadre du plan de sauvegarde de l'emploi témoigne de leur absence d'une
quelconque volonté de bénéficier d'un reclassement effectif aussi bien
en France qu'à l'étranger ;
- la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi mis en place au
sein d'une société mise en liquidation judiciaire doit s'apprécier au
niveau des moyens de celle-ci et non pas au regard de la santé
financière du groupe auquel elle appartient ; en tout état de cause, la
participation financière de la société ODC au plan de sauvegarde de
l'emploi mise en place par sa filiale ODCF, qui représente près de 20 %
de son montant total, est particulièrement conséquente ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2014, présenté pour M.
AS..., M. AR..., M. H..., M. AQ..., M. I..., M. AU..., M. J..., M.
CJ..., M. AV..., M. Z..., M. Y..., M. C..., M. CO..., M. G..., M.
CZ..., M. A... E..., M. AW..., M. CL..., Mme BV..., Mme BW..., M.
BU..., Mme BT..., M. X..., M. BS..., M. CM..., M. BD..., M. BY..., M.
CN..., M. BA..., Mme BZ..., M. BE..., M. O..., Mme BG..., Mme BH..., M.
BK..., M. BF..., M. Q..., M. AD..., Mme AH..., M. AI..., M. N..., M.
Loucif, M. CV..., M. BQ..., M. AL..., M. CP..., M. CQ..., Mme CS...,
Mme CD..., M. BN..., M. CY..., M. BR..., M. CS..., M. AN..., M. CT...,
M. AO..., M. R..., par le cabinet Brun ;
M. AS...et autres concluent au rejet du recours du ministre et à la
condamnation de l'État à verser à chacun d'entre eux la somme de 1 000
euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
M. AS...et autres soutiennent que :
- le recours du ministre, présenté plus de quinze jours après la
notification du jugement attaqué, est irrecevable parce que tardif ; il
est également irrecevable faute de comporter les noms et domiciles des
parties intimées en méconnaissance des dispositions de l'article R.
411-1 du code de justice administrative ;
- le tribunal s'est fondé sur les éléments du dossier ainsi que sur
ceux recueillis lors de l'instruction pour annuler la décision
d'homologation du directeur régional des entreprises, de la
concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi
Champagne-Ardenne ;
-l'enveloppe globale de financement du plan de sauvegarde de l'emploi
est insuffisante au regard des résultats du groupe Sanwa auquel
appartient la société ODCF ; le budget alloué à l'aide à la mobilité
géographique est insuffisant pour inciter les salariés licenciés à
candidater sur l'un des soixante postes de reclassement internes
offerts par le groupe essentiellement en Asie ;
- la détérioration de la situation bilancielle et de résultats d'ODCF
résulte d'une augmentation des prix de transfert imposée par le groupe
et de l'absence d'investissements sur le site de Reims ; le recours à
une procédure collective n'est pas la conséquence d'une conjoncture
économique défavorable mais résulte d'une stratégie du groupe pour
s'exonérer de ses obligations réglementaires en matière de
revitalisation du bassin d'emploi et de congé de reclassement ;
Vu l'ordonnance en date du 16 avril 2014 fixant la clôture de
l'instruction le 30 avril 2014 à 16 heures ;
Vu le mémoire en intervention, enregistré le 30 avril 2014, présenté
pour Me Deltouren sa qualité de liquidateur judiciaire de la société
ODCF, dont le siège social est situé au 1, rue Maurice Hollande, ZI Sud
Est, à Reims (51100), par la SCP d'avocats Lyon-Caen-Thiriez, qui
conclut à l'annulation du jugement du 11 février 2014 par lequel le
tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du
16 octobre 2013 par laquelle le directeur régional des entreprises, de
la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de
Champagne-Ardenne a homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de
l'entreprise ODCF ;
Me Deltoursoutient que :
- l'absence de mention du domicile des défendeurs n'est pas une cause
d'irrecevabilité d'une requête d'appel dirigée contre un jugement rendu
en matière de recours pour excès de pouvoir qui est un procès fait à un
acte ;
- la mesure d'instruction ordonnée par le tribunal le 14 janvier 2014
et la réponse apportée par les salariés à cette mesure ne lui ayant pas
été communiquées, la procédure juridictionnelle est irrégulière ;
- l'office du juge administratif ne peut porter sur la vérification du
caractère suffisamment incitatif ou non des mesures du plan de
sauvegarde de l'emploi ou sur le caractère suffisant des aides à la
mobilité géographique des salariés sans empiéter sur un contrôle
d'opportunité, c'est-à-dire un contrôle de la gestion de l'entreprise
qui n'appartient qu'à l'employeur ;
Vu, II°), sous le numéro 14NC00635, la requête, enregistrée le 14 avril
2014, présentée pour MeAX..., en sa qualité de liquidateur judiciaire
de la société ODCF, dont le siège social est situé au 1, rue Maurice
Hollande, ZI Sud Est, à Reims (51100), par la SCP d'avocats
Lyon-Caen-Thiriez ; Me Deltourdemande à la Cour :
1°) d'annuler les jugements n° 1302032 et suivants du 11 février 2014
par lesquels le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé
la décision du 16 octobre 2013 par laquelle le directeur régional des
entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de
l'emploi de Champagne-Ardenne a homologué le plan de sauvegarde de
l'emploi de l'entreprise ODCF ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. FabriceG...et autres
devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
3°) de mettre à la charge de M. G...et des 56 autres demandeurs de
première instance la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Me Deltoursoutient que :
- le jugement attaqué, qui ne comporte aucune donnée chiffrée sur les
moyens financiers de l'entreprise placée en liquidation judiciaire et
du groupe auquel elle appartient, est insuffisamment motivé ;
- les premiers juges, qui ont fondé leur décision sur les déclarations
des demandeurs de première instance à l'audience, ont méconnu l'article
R. 613-3 du code de justice administrative ;
- le tribunal a commis une erreur de droit en opérant un contrôle
d'opportunité sur le caractère suffisant ou pas des mesures prévues par
le plan de sauvegarde de l'emploi alors qu'il aurait dû se limiter à
opérer un contrôle de légalité de la décision d'homologation du
directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l'emploi ; le contrôle du juge
administratif aurait dû être en l'espèce un contrôle restreint sur les
mesures du plan compte tenu du délai de quatre jours dans lequel le
directeur a été amené à se prononcer et des spécificités du placement
d'une entreprise en liquidation judiciaire ; le tribunal a commis une
seconde erreur de droit en se substituant à l'employeur ; le contrôle
du juge doit se limiter à un contrôle de la méthode employée par le
législateur pour répondre au mieux aux objectifs posés par les articles
L. 1233-61 et L. 1233-63 du code du travail ;
- le tribunal, en considérant que les mesures prévues au plan de
sauvegarde de l'emploi étaient insuffisamment incitatives alors que
l'enveloppe globale de financement avait été portée à 500 000 euros et
la durée du plan allongée de 9 à 12 mois, a entaché son jugement d'une
erreur d'appréciation ;
Vu le mémoire en intervention, enregistré le 16 avril 2014, présenté
pour la société Overhead Door Corporation, dont le siège est situé 2501
S. State Hwy 121, Suite 200, Lewisville, Texas, 75067, États-Unis
d'Amérique, par Me AssayaetAA..., qui conclut à l'annulation du
jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 16 octobre 2013 par
laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de
la consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne a
homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de l'entreprise ODCF ;
- les premiers juges, qui ont fondé leur décision sur les déclarations
des demandeurs de première instance à l'audience, ont méconnu le
principe du contradictoire ; le tribunal, en s'estimant saisi d'un
recours de plein contentieux, a commis une erreur de droit ;
- ni l'administration, ni le juge administratif ne sauraient exercer un
contrôle d'opportunité sur le contenu des mesures d'un plan de
sauvegarde de l'emploi ; le tribunal a excédé ses pouvoirs en
appréciant l'opportunité et l'efficacité des mesures prévues au plan de
sauvegarde de l'emploi de la société ODCF, et notamment des mesures
destinées à accompagner les salariés de cette société dans le cadre
d'une mobilité en France ou à l'étranger ;
- la société ODCF a respecté ses obligations légales et réglementaires
en prévoyant des mesures proportionnées à ses moyens ainsi qu'à ceux du
groupe auquel elle appartient ;
- le refus des salariés de suivre les mesures mises en oeuvre dans le
cadre du plan de sauvegarde de l'emploi témoigne de leur absence d'une
quelconque volonté de bénéficier d'un reclassement effectif aussi bien
en France qu'à l'étranger ;
- la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi mis en place au
sein d'une société mise en liquidation judiciaire doit s'apprécier au
niveau des moyens de celle-ci et non pas au regard de la santé
financière du groupe auquel elle appartient ; en tout état de cause, la
participation financière de la société ODC au plan de sauvegarde de
l'emploi mise en place par sa filiale ODCF, qui représente près de 20 %
de son montant total, est particulièrement conséquente ;
Vu le mémoire en intervention, enregistré le 18 avril 2014, présenté
pour le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social qui
renvoie à son recours produit dans l'instance 14NC00528 ;
Vu l'ordonnance en date du 18 avril 2014 fixant la clôture de
l'instruction le 30 avril 2014 à 16 heures ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2014, présenté pour M.
AS..., M. AR..., M. H..., M. AQ..., M. I..., M. AU..., M. J..., M.
CJ..., M. AV..., M. Z..., M. Y..., M. C..., M. CO..., M. G..., M.
CZ..., M. A... E..., M. AW..., M. CL..., Mme BV..., Mme BW..., M.
BU..., Mme BT..., M. X..., M. BS..., M. CM..., M. BD..., M. BY..., M.
CN..., M. BA..., Mme BZ..., M. BE..., M. O..., Mme BG..., Mme BH..., M.
BK..., M. BF..., M. Q..., M. AD..., Mme AH..., M. AI..., M. N..., M.
Loucif, M. CV..., M. BQ..., M. AL..., M. CP..., M. CQ..., Mme CS...,
Mme CD..., M. BN..., M. CY..., M. BR..., M. CS..., M. AN..., M. CT...,
M. AO..., M. R..., par le cabinet Brun ;
M. AS...et autres concluent au rejet de la requête de Me Deltouret à la
condamnation de MeAX..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la
société ODCF, à verser à chacun d'entre eux la somme de 1 000 euros sur
le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. AS...et autres soutiennent que :
- la requête de MeAX..., présentée plus de quinze jours après la
notification du jugement attaqué, est irrecevable parce que tardive ;
elle est également irrecevable faute de comporter les noms et domiciles
des parties intimées en méconnaissance des dispositions de l'article R.
411-1 du code de justice administrative ;
- le tribunal s'est fondé sur les éléments du dossier ainsi que sur
ceux recueillis lors de l'instruction pour annuler la décision
d'homologation du directeur régional des entreprises, de la
concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de
Champagne-Ardenne ;
-l'enveloppe globale de financement du plan de sauvegarde de l'emploi
est insuffisante au regard des résultats du groupe Sanwa auquel
appartient la société ODCF ; le budget alloué à l'aide à la mobilité
géographique est insuffisant pour inciter les salariés licenciés à
candidater sur l'un des soixante postes de reclassement internes
offerts par le groupe essentiellement en Asie ;
- la détérioration de la situation bilancielle et de résultats d'ODCF
résulte d'une augmentation des prix de transfert imposée par le groupe
et de l'absence d'investissements sur le site de Reims ; le recours à
une procédure collective n'est pas la conséquence d'une conjoncture
économique défavorable mais résulte d'une stratégie du groupe pour
s'exonérer de ses obligations réglementaires en matière de
revitalisation du bassin d'emploi et de congé de reclassement ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2014, présenté pour Me Deltourqui
conclut aux mêmes fins que sa requête ;
Me Deltoursoutient que :
- l'absence de mention du domicile des défendeurs n'est pas une cause
d'irrecevabilité d'une requête d'appel dirigée contre un jugement rendu
en matière de recours pour excès de pouvoir qui est un procès fait à un
acte ;
- la mesure d'instruction ordonnée par le tribunal le 14 janvier 2014
et la réponse apportée par les salariés à cette mesure ne lui ayant pas
été communiquées, la procédure juridictionnelle est irrégulière ;
- l'office du juge administratif ne peut porter sur la vérification du
caractère suffisamment incitatif ou non des mesures du plan de
sauvegarde de l'emploi ou sur le caractère suffisant des aides à la
mobilité géographique des salariés sans empiéter sur un contrôle
d'opportunité, c'est-à-dire un contrôle de la gestion de l'entreprise
qui n'appartient qu'à l'employeur ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2014 à 20 heures, présenté par le
ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2014, présenté pour M. AS...,
M.AR..., M. H..., M. AQ..., M. I..., M. AU..., M. J..., M. CJ..., M.
AV..., M. Z..., M. Y..., M. C..., M. CO..., M. G..., M. CZ..., M. A...
E..., M. AW..., M. CL..., Mme BV..., Mme BW..., M. BU..., Mme BT..., M.
X..., M. BS..., M. CM..., M. BD..., M. BY..., M. CN..., M. BA..., Mme
BZ..., M. BE..., M. O..., Mme BG..., Mme BH..., M. BK..., M. BF..., M.
Q..., M. AD..., Mme AH..., M. AI..., M. N..., M. Loucif, M. CV..., M.
BQ..., M. AL..., M. CP..., M. CQ..., Mme CS..., Mme CD..., M. BN..., M.
CY..., M. BR..., M. CS..., M. AN..., M. CT..., M. AO... et M. R... ;
Vu, III°), sous le numéro 14NC00675, la requête, enregistrée le 18
avril 2014, présentée pour la société Overhead Door Corporation, dont
le siège est situé 2501 S. State Hwy 121, Suite 200, Lewisville, Texas,
75067, États-Unis d'Amérique, par Me AssayaetAA... ;
La société ODC demande à la Cour :
1°) d'annuler les jugements n° 1302032 et suivants du 11 février 2014
par lesquels le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé
la décision du 16 octobre 2013 par laquelle le directeur régional des
entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de
l'emploi de Champagne-Ardenne a homologué le plan de sauvegarde de
l'emploi de l'entreprise ODCF ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. FabriceG...et autres
devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
3°) de mettre à la charge solidairement de M. G...et des 56 autres
demandeurs de première instance la somme de 3 000 euros sur le
fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société ODC soutient que :
- les premiers juges, qui ont fondé leur décision sur les déclarations
des demandeurs de première instance à l'audience, ont méconnu le
principe du contradictoire ; le tribunal, en s'estimant saisi d'un
recours de plein contentieux, a commis une erreur de droit ;
- ni l'administration, ni le juge administratif ne sauraient exercer un
contrôle d'opportunité sur le contenu des mesures d'un plan de
sauvegarde de l'emploi ; le tribunal a excédé ses pouvoirs en
appréciant l'opportunité et l'efficacité des mesures prévues au plan de
sauvegarde de l'emploi de la société ODCF, et notamment des mesures
destinées à accompagner les salariés de cette société dans le cadre
d'une mobilité en France ou à l'étranger ;
- la société ODCF a respecté ses obligations légales et réglementaires
en prévoyant des mesures proportionnées à ses moyens ainsi qu'à ceux du
groupe auquel elle appartient ;
- le refus des salariés de suivre les mesures mises en oeuvre dans le
cadre du plan de sauvegarde de l'emploi témoigne de leur absence d'une
quelconque volonté de bénéficier d'un reclassement effectif aussi bien
en France qu'à l'étranger ;
- la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi mis en place au
sein d'une société mise en liquidation judiciaire doit s'apprécier au
niveau des moyens de celle-ci et non pas au regard de la santé
financière du groupe auquel elle appartient ; en tout état de cause, la
participation financière de la société ODC au plan de sauvegarde de
l'emploi mise en place par sa filiale ODCF, qui représente près de 20 %
de son montant total, est particulièrement conséquente ;
Vu l'ordonnance en date du 22 avril 2014 fixant la clôture de
l'instruction le 30 avril 2014 à 16 heures ;
Vu le mémoire en intervention, enregistré le 30 avril 2014, présenté
pour Me Deltouren sa qualité de liquidateur judiciaire de la société
ODCF, dont le siège social est situé au 1, rue Maurice Hollande, ZI Sud
Est, à Reims (51100) par la SCP d'avocats Lyon-Caen-Thiriez, qui
conclut à l'annulation du jugement du 11 février 2014 par lequel le
tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du
16 octobre 2013 par laquelle le directeur régional des entreprises, de
la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de
Champagne-Ardenne a homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de
l'entreprise ODCF ;
Me Deltoursoutient que :
- l'absence de mention du domicile des défendeurs n'est pas une cause
d'irrecevabilité d'une requête d'appel dirigée contre un jugement rendu
en matière de recours pour excès de pouvoir qui est un procès fait à un
acte ;
- la mesure d'instruction ordonnée par le tribunal le 14 janvier 2014
et la réponse apportée par les salariés à cette mesure ne lui ayant pas
été communiquées, la procédure juridictionnelle est irrégulière ;
- l'office du juge administratif ne peut porter sur la vérification du
caractère suffisamment incitatif ou non des mesures du plan de
sauvegarde de l'emploi ou sur le caractère suffisant des aides à la
mobilité géographique des salariés sans empiéter sur un contrôle
d'opportunité, c'est-à-dire un contrôle de la gestion de l'entreprise
qui n'appartient qu'à l'employeur ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2014 à 20 heures, présenté par le
ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2014 :
- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,
- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,
- et les observations de M.AE..., adjoint au responsable de l'unité
territoriale de la Marne de la direction régionale des entreprises, de
la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de
Champagne-Ardenne, dûment mandaté, pour le ministre du travail, de
l'emploi et du dialogue social, Me Sarrazin, avocat, pour MeAX...,
agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société OCDF, Me
Assayaet MeAA..., avocats, pour la société ODC, et Me Couchou-Meillot,
avocat, pour M. AS...et autres ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1235-7-1 du code du
travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le
document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le
contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par
l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de
la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un
litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou
d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges
relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal
administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou
contentieux. / Le recours est présenté dans un délai de deux mois par
l'employeur à compter de la notification de la décision de validation
ou d'homologation, et par les organisations syndicales et les salariés
à compter de la date à laquelle cette décision a été portée à leur
connaissance conformément à l'article L. 1233-57-4. / Le tribunal
administratif statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce
délai, il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté
devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de
trois mois. Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou
en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil
d'État. / Le livre V du code de justice administrative est applicable.
" ;
2. Considérant que, par jugement du 1er juillet 2013, le tribunal de
commerce de Reims a ouvert une procédure de liquidation judiciaire sans
poursuite d'activité autorisée à l'encontre de la société ODCF,
spécialisée dans la fabrication et la commercialisation des portes de
garage ; que cette société est membre du groupe Overhead Door
Corporation dont la société mère, la société Overhead Door Corporation,
basée aux États-Unis, fait elle-même partie d'un consortium japonais,
le consortium Sanwa ; que l'activité de la société ODCF a été arrêtée à
la date du jugement et les postes de travail des 62 salariés supprimés
dans les 21 jours ; que, par courrier du 20 juillet 2013, MeAX...,
mandataire judiciaire à la liquidation, a saisi la direction régionale
des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et
de l'emploi (DIRECCTE) Champagne-Ardenne d'une demande d'homologation
du plan de sauvegarde pour l'emploi (PSE) ; que le directeur régional
des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et
de l'emploi de Champagne-Ardenne a d'abord refusé d'homologuer ce plan
en raison de l'insuffisance des mesures de reclassement au regard des
moyens du groupe japonais Sanwa Holding Corporation ; que le 14 octobre
2013, Me Deltoura déposé auprès de la DIRECCTE Champagne-Ardenne un
nouveau dossier de demande d'homologation ; que le ministre en charge
du travail, Me Deltouragissant en sa qualité de liquidateur judiciaire
de la société OCDF et la société Overhead Door Corporation (ODC)
demandent par trois requêtes séparées l'annulation du jugement du 11
février 2014 par lequel le tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 16 octobre 2013 par
laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de
la consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne a
homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de l'entreprise ODCF ;
Sur la jonction :
3. Considérant que le recours du ministre du travail et les requêtes de
MeAX..., agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société
ODCF, et de la société ODC sont dirigées contre le même jugement et ont
fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre
pour statuer par un seul arrêt ;
Sur les interventions de la société ODC, de Me Deltouren qualité de
liquidateur judiciaire de la société OCDF et du ministre du travail, de
l'emploi et du dialogue social :
4. Considérant que la société ODC et Me Deltouront intérêt à
l'annulation du jugement attaqué, qu'ainsi leurs interventions à
l'appui du recours du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue
social sont recevables ; que, pour les mêmes motifs sont également
recevables les interventions de la société ODC et du ministre à l'appui
de la requête de MeAX..., et l'intervention de Me Deltourà l'appui de
la requête de la société ODC ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées
par M. AS...et autres :
Sur la régularité du jugement :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 613-2 du
code de justice administrative : " Si le président de la formation de
jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est
close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans
l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne.
[...] " ; qu'aux termes de l'article R. 613-3 du même code : " Les
mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu
à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. / Si les
parties présentent avant la clôture de l'instruction des conclusions
nouvelles ou des moyens nouveaux, la juridiction ne peut les adopter
sans ordonner un supplément d'instruction. " ;
6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les
salariés auraient apporté des éléments nouveaux à l'audience ; que par
courriers du 8 janvier 2014, le tribunal a, d'une part, sollicité le
liquidateur pour obtenir un certain nombre de données, d'autre part,
rouvert l'instruction ; que les données sollicités ont été transmises
au tribunal le 14 janvier 2014 et aussitôt communiquées ; qu'enfin les
parties ont eu tout loisir de s'exprimer à l'audience qui a duré plus
de trois heures et à l'issue de laquelle deux notes en délibéré ont été
produites, l'une le 7 février 2014 pour MeAX..., l'autre le 10 février
2014 par le ministre ; que, par suite, les moyens tirés de ce que les
premiers juges auraient méconnu les dispositions précitées des articles
R. 613-2 et R. 613-3 du code de justice administrative ainsi que le
principe du contradictoire ne peuvent qu'être écartés ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que pour annuler la décision du
directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne du 16
octobre 2013, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance
que les mesures prévues au plan de sauvegarde de l'emploi étaient
inadaptées pour permettre le reclassement externe des salariés et
insuffisantes au regard des moyens du groupe ; qu'il s'est donc bien
placé à la date du 16 octobre 2013 pour décider que le directeur
régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du
travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne avait commis une erreur
d'appréciation en homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi qui lui
avait été soumis ; que si le tribunal a, à titre surabondant, évoqué la
lenteur dans la mise en oeuvre du plan et le peu de succès de ses
mesures, cette seule circonstance ne saurait suffire pour considérer
que le tribunal aurait estimé à tort être saisi d'un recours de plein
contentieux ;
8. Considérant, en dernier lieu, qu'au considérant 14 de son jugement,
le tribunal administratif affirme qu' " il ressort des pièces du
dossier que le groupe dont faisait partie la société ODCF dispose des
moyens suffisants permettant de mettre en place un plan de sauvegarde
plus efficace que celui homologué par le présent litige. " ; que le
tribunal a ainsi annulé la décision du directeur régional des
entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de
l'emploi Champagne Ardenne du 16 octobre 2013 au motif que cette
décision était entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que les
mesures prévues au plan de sauvegarde de l'emploi étaient insuffisantes
au regard des moyens du groupe Sanwa ; qu'alors même que le tribunal
n'a fait que se référer aux pièces du dossier sans étayer ses
affirmations par une référence aux données figurant au dossier,
notamment celles extraites du rapport établi par le cabinet Syndec le 5
septembre 2013, le jugement du 11 février 2014 est ainsi suffisamment
motivé ;
Sur la légalité de la décision du 16 octobre 2013 :
9. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1233-61 du
code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés,
lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans
une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre
un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en
limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à
faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait
être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des
caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion
professionnelle particulièrement difficile. " ; qu'aux termes de
l'article L. 1233-62 : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des
mesures telles que : 1° Des actions en vue du reclassement interne des
salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou
équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès
des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; 2°
Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; 3° Des actions
favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le
soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; 4° Des actions de
soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités
existantes par les salariés ; 5° Des actions de formation, de
validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à
faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des
emplois équivalents ; 6° Des mesures de réduction ou d'aménagement du
temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des
heures supplémentaires réalisées de manière régulière lorsque ce volume
montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la
base d'une durée collective manifestement supérieure à trente-cinq
heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction
pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est
envisagée. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-63 : " Le plan de
sauvegarde de l'emploi détermine les modalités de suivi de la mise en
oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement
prévu à l'article L. 1233-61. Ce suivi fait l'objet d'une consultation
régulière et détaillée du comité d'entreprise ou, à défaut, des
délégués du personnel dont les avis sont transmis à l'autorité
administrative. L'autorité administrative est associée au suivi de ces
mesures et reçoit un bilan, établi par l'employeur, de la mise en
oeuvre effective du plan de sauvegarde de l'emploi " ;
10. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1233-58 du
même code : " I. - En cas de [...] liquidation judiciaire, [...] le
liquidateur [...] qui envisage des licenciements économiques, met en
oeuvre un plan de licenciement dans les conditions prévues aux articles
L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4. [...] le liquidateur [...] réunit et
consulte le comité d'entreprise [...] dans les conditions prévues à
l'article L. 2323-15 ainsi qu'aux articles : 3° L. 1233-30, I à
l'exception du dernier alinéa, et deux derniers alinéas du II, pour un
licenciement d'au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins
cinquante salariés ; 4° L. 1233-31 à L. 1233-33, L. 1233-48 et L.
1233-63, relatifs à la nature des renseignements et au contenu des
mesures sociales adressés aux représentants du personnel et à
l'autorité administrative ; 5° L. 1233-49, L. 1233-61 et L. 1233-62,
relatifs au plan de sauvegarde de l'emploi ; 6° L. 1233-57-5 et L.
1233-57-6, pour un licenciement d'au moins dix salariés dans une
entreprise d'au moins cinquante salariés. II. - Pour un licenciement
d'au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins cinquante
salariés, l'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 est validé et le
document mentionné à l'article L. 1233-24-4, élaboré par [...] le
liquidateur, est homologué dans les conditions fixées aux articles L.
1233-57-1 à L. 1233-57-3, aux deuxième et troisième alinéas de
l'article L. 1233-57-4 et à l'article L. 1233-57-7. Les délais prévus
au premier alinéa de l'article L. 1233-57-4 sont ramenés, à compter de
la dernière réunion du comité d'entreprise, [...] à quatre jours en cas
de liquidation judiciaire. [...] le liquidateur ne peut procéder, sous
peine d'irrégularité, à la rupture des contrats de travail avant la
notification de la décision favorable de validation ou d'homologation,
ou l'expiration des délais mentionnés au deuxième alinéa du présent " ;
qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " En l'absence
d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des
points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité
administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné
à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son
contenu aux dispositions législatives et aux stipulations
conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de
l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et
de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité
d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de
coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, et le respect par le
plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en
fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent
l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les
mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de
licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que
mentionnés aux articles L 1233-4 et L. 6321-1. Elle prend en compte le
rapport le plus récent établi par le comité d'entreprise au titre de
l'article L. 2323-26-2, concernant l'utilisation du crédit d'impôt
compétitivité emploi. Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours
au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L.
1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à
l'article L. 1233-71. " ;
11. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions
précitées qu'il appartient à l'administration, saisie, comme en
l'espèce, par le liquidateur, d'une demande d'homologation d'un plan de
sauvegarde de l'emploi élaboré unilatéralement à la suite de
l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire sans poursuite
d'activité, d'apprécier si les mesures prévues à ce plan sont à la fois
adaptées au regard de l'objectif de reclassement des salariés dont le
licenciement ne peut être évité et proportionnées au regard des moyens
de l'entreprise, de l'unité économique et sociale ou du groupe ; qu'il
appartient au juge administratif, saisi d'un recours en excès de
pouvoir contre la décision par laquelle l'autorité administrative a
homologué ou refusé d'homologuer un plan social, de contrôler la
qualification juridique par l'administration des faits, et donc
d'apprécier si le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi était de
nature à justifier ou pas son homologation au regard notamment des
dispositions précitées de l'article L. 1233-57-3 ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le nouveau
dossier de demande d'homologation déposé le 14 octobre 2013 par Me
Deltourauprès de la DIRECCTE Champagne-Ardenne prévoyait une enveloppe
financière globale de 500 000 euros destinée à financer des formations,
des aides à la création d'entreprise, des aides à la mobilité
géographique, et la part patronale de la portabilité mutuelle et
prévoyance pour des montants respectifs de 280 000, 72 000, 74 000 et
60 000 euros ; que pour homologuer, par la décision contestée du 16
octobre 2013, le plan de sauvegarde de l'emploi qui lui était soumis,
le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne, après
avoir relevé que le liquidateur avait apporté plusieurs améliorations
par rapport au premier dossier de demande d'homologation, a considéré
que " les mesures proposées étaient proportionnées aux moyens de
l'entreprise et adaptées aux publics concernés " ;
En ce qui concerne le caractère adapté des mesures :
13. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que sur les 62
salariés licenciés (hors apprenti), 42 sont des ouvriers/employés -dont
25 opérateurs d'atelier-, 10 des agents de maîtrise, 9 des cadres ;
que, le jugement du 11 juillet 2013 du tribunal de commerce de Reims
ayant ouvert une procédure de liquidation judiciaire sans poursuite
d'activité autorisée, le reclassement de ces 62 salariés n'est pas
possible dans l'entreprise ODCF qui ne comporte qu'un seul
établissement, celui de Reims ; que le reclassement ne peut donc
s'opérer que dans le groupe ou à l'externe ; que le groupe ne possède
qu'une seule autre usine en France, celle de Novoferm à Melun ; que par
ailleurs, la situation de l'emploi industriel en Champagne-Ardenne,
notamment dans le secteur métallurgique, offre peu de perspective de
reclassement dans la région ; que les salariés licenciés devront ainsi
pour la plupart d'entre eux accepter une mobilité pour espérer
retrouver un emploi ; que l'accent mis par le plan de sauvegarde de
l'emploi à la fois sur les aides à la formation et à la mobilité
géographique est donc adapté au profil des publics concernés au regard
de la situation de l'emploi ;
En ce qui concerne le caractère proportionné des mesures :
14. Considérant, d'une part, que l'enveloppe moyenne de financement par
salarié dédiée aux mesures de reclassement - déduction faite de la part
patronale de portabilité mutuelle et prévoyance, qui n'entre pas dans
les mesures relevant d'un plan de sauvegarde de l'emploi, lequel a pour
seul objet d'éviter les licenciements, de les limiter ou, à défaut, de
reclasser les salariés dont le licenciement ne peut être évité - est de
7 096,77 euros : que les annexes 2, 3 et 4 au plan de sauvegarde de
l'emploi recensent les postes disponibles dans le groupe respectivement
en France -6 postes dont 4 postes d'opérateurs, un poste de vendeur et
un poste de responsable maintenance-, en Europe hors France -5 postes-
et hors Europe -20 en Asie, près de 60 aux États-Unis ; que les postes
hors France sont des postes qualifiés et requérant par ailleurs la
maîtrise d'une langue étrangère ; que l'affectation sur ces postes d'un
salarié licencié de Reims nécessiterait donc à la fois une formation
qualifiante ainsi qu'une formation linguistique ; qu'elle impliquerait
également des aides financières conséquentes en termes de mobilité ;
qu'en cette matière, le plan de sauvegarde de l'emploi distingue les
aides à la mobilité accordées aux salariés acceptant un reclassement
dans le groupe en France - les 6 postes à Melun - et celles versées aux
salariés acceptant un reclassement externe au groupe ; que les mesures
d'accompagnement au reclassement interne s'appliquent, selon les termes
mêmes du plan de sauvegarde de l'emploi, aux seuls reclassements au
sein du groupe en France ; que contrairement à ce que soutient la
société ODC dans ses écritures, il ne ressort pas de la lecture du plan
de sauvegarde de l'emploi que les aides à la mobilité géographique
versées aux salariés acceptant un reclassement externe au groupe
seraient également applicables aux salariés acceptant un reclassement
interne au groupe ailleurs qu'en France ; qu'en tout état de cause, les
mesures d'aide à la mobilité géographique prévues pour un reclassement
externe -prise en charge des frais de déménagement dans la limite de 2
000 euros, paiement d'une indemnité de changement de domicile s'élevant
à 800 euros pour les salariés célibataires majorée de 240 euros pour
les salariés chargés de famille, prise en charge des frais de double
résidence et d'agence dans la limite de 5 040 euros par salarié et
prise en charge des frais de nuits d'hôtel, les jours de déménagement
et d'emménagement dans la limite de 150 euros par jour, aide au
reclassement du conjoint de 2 000 euros-, à supposer qu'elles soient
suffisantes pour un reclassement en France, ne sont pas d'un montant
suffisant pour permettre à un salarié de postuler à un reclassement
interne dans le groupe à l'étranger ; qu'à la date de la décision du
directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne, 18
salariés avaient fait connaître leur accord pour recevoir une offre de
poste à l'étranger ; que contrairement à ce que soutient la société
ODC, les salariés n'étaient donc pas réfractaires par principe à une
mobilité à l'étranger ; qu'ainsi, alors que le plan de sauvegarde de
l'emploi met l'accent sur les possibilités de reclassement au sein du
groupe à l'étranger, il ne prévoit pas en parallèle des mesures d'aide
à la mobilité suffisantes compte tenu des frais nécessairement
impliqués par une mobilité, notamment à l'étranger ; que les salariés
soutiennent sans être contredits qu'aucun financement public n'a été
prévu pour compléter ou pallier l'insuffisance de ces mesures ;
15. Considérant qu'il est constant que le groupe a répondu positivement
à la demande du liquidateur en acceptant d'abonder le plan de
sauvegarde de l'emploi à hauteur de 100 000 euros sur les 500 000
budgétés ; que cette seule circonstance ne saurait toutefois suffire
pour considérer, comme le suggère la société ODC, que le liquidateur
s'étant ainsi acquitté de son obligation de saisir le groupe d'une
mesure d'abondement, la proportionnalité des mesures du plan de
sauvegarde de l'emploi devrait s'apprécier au regard des seuls moyens
de la société ODCF et non plus au regard de la situation financière du
groupe auquel elle appartient ; qu'il résulte en effet des dispositions
précitées de l'article L. 1233-57-3 du code du travail qu'il appartient
à l'autorité administrative d'apprécier si les mesures prévues au plan
de sauvegarde de l'emploi sont proportionnées au regard des moyens de
l'entreprise, de l'unité économique et sociale ou du groupe ; qu'il
ressort du rapport figurant au dossier de première instance établi par
le cabinet Syndec le 5 septembre 2013 que le bénéfice du groupe Sanwa à
fin mars 2012 était de 40 millions de dollars, soit son meilleur
résultat sur la période 2009-2012 ; que ces données ne sont pas
contestées par la société ODC ; qu'ainsi, au regard des moyens dont
dispose le groupe, l'enveloppe financière consacrée au plan de
sauvegarde de l'emploi est insuffisante, notamment pour permettre
d'assurer le reclassement des salariés dans le groupe à l'étranger ;
16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre en
charge du travail, Me Deltour, en sa qualité de liquidateur judiciaire
de la société ODCF, et la société ODC ne sont pas fondés à soutenir que
c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 16
octobre 2013 du directeur régional des entreprises, de la concurrence,
de la consommation, du travail et de l'emploi de Champagne-Ardenne
homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société ODCF ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de
justice administrative font obstacle à ce que M. AS...et autres qui
n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de parties perdantes,
versent à la société ODC et à MeAX..., en sa qualité de liquidateur
judiciaire de la société ODCF, les sommes qu'ils réclament au titre des
frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en
revanche de condamner l'État à verser à chacun des 57 salariés la somme
de 100 euros sur le même fondement ; que Me Deltouren sa qualité de
liquidateur judiciaire de la société ODCF est également condamné à
verser à chacun des 57 salariés la somme de 100 euros ;
D É C I D E :
Article 1er : Les interventions respectives de la société ODC, de Me
Deltouren qualité de liquidateur de la société OCDF, et du ministre du
travail, de l'emploi et du dialogue social sont admises.
Article 2 : Le recours du ministre du travail, de l'emploi et du
dialogue social et les requêtes de MeAX..., en sa qualité de
liquidateur judiciaire de la société ODCF, et de la société ODC sont
rejetés.
Article 3 : L'État et MeAX..., en sa qualité de liquidateur judiciaire
de la société ODCF, verseront l'un et l'autre à chacun des 57
demandeurs la somme de 100 (cent euros) au titre de l'article L. 761-1
du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, de
l'emploi et du dialogue social, à Me FrançoisDeltour, en sa qualité de
mandataire judiciaire de la société ODCF, à la société Overhead Door
Corporation, à M. CG... AS..., à M. AZ... AR..., à M. CG... H..., à M.
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N° 14NC00528-14NC00635-14NC00675
Analyse
Abstrats : 66-07 Travail et emploi.
Licenciements.